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20 novembre 2009 5 20 /11 /novembre /2009 06:45
Nils - III :
La quête d'Isis.





(Le faucon vint au trône, un mot entre le bec,
Avec sa main dorée la déesse le prit ;
Elle lu... Et malheur! Un pleur de son oeil sec
S'échappa car le sort d'Osiris elle apprit.)



Elle aborda alors une barque céleste
Et quitta la nue bleue et sa cour magnifique
Pour trouver sur le sol les organes et restes
Parsemés par Seth, le grand chacal horrifique.

Elle alla au désert de sable incandescent
Où l'ombre s'effaçait sous le joug du soleil,
Où la charogne ouvrait son poitrail indécent
Au hibou charognard terré dans son sommeil.

Elle alla ramper sous le front des pyramides
Desceller les tombeaux et les portes stoïques,
Ses yeux étincelants dans les caves humides
Aperçurent l'histoire arrangée ; héroïque.

Elle alla sur le Nil et brassa le limon,
Les roseaux se pliaient quand approchait sa barque,
Le bruit de l'eau jouait la symphonie sans nom
Que connaît l'ingénu, qu'ignore le monarque.

Et elle sillonna les sept étendues bleues,
Fit émerger l'épave et la ville noyée,
Le calmar titanesque avec des dents aux yeux
Qui enfantait la nuit une fois déployé.

Elle arpenta les monts, leurs chemins escarpés,
La gorge, la canyon, la cime et la crevasse,
Le centre de la terre au grand Caire usurpé,
Le ventre de magma du volcan qui menace.

Elle s'en retourna par la voie des nuages,
Le faucon de vermeil escortait son navire,
Elle atteignit enfin le céleste rivage
Avec l'entièreté que Seth put lui ravir.



(Elle ré-assembla le corps jadis ravi
Et cousu chaque membre avec le fil divin,
Et du vent de son aile insuffla feu et vie
Dans cet amas de chair et Osiris revint.)




 

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20 novembre 2009 5 20 /11 /novembre /2009 03:58
Incantations - V :
Le mépris.




La gravité du temps se déploie sur les dos
Et le néant rappelle en son sein ses enfants :
Ces enfants à qui l'aube a légué le fardeau
Du rêve inaccompli, de l'ennui triomphant,

Ces enfants de la terre aux talons des cyclopes
Que l'on nomme personne, anonyme ou quidam,
Ces gens déterminés par un triste horoscope
Qui dans l'âtre du coeur ne portent nulle flamme.

Une quelconque idée d'un destin différent
Ne les a pas frappé du trait de l'ambition
Ni les poussa ainsi à s'extraire des rangs
Afin de n'avoir d'yeux que pour leurs illusions.

Les grèves inconnues où gît l'eau de turquoise
Dont le ciel est teinté de l'azur éternel
Ne magnétisent plus au profit de narquoises
Existences marquées de jours sempiternels.

Où sont les conquérants de lunes, d'Amériques,
De condition meilleure au prix du cou qui tombe,
Au prix de l'échafaud , de l'hallali publique
Et du regret sincère au perron de leur tombe?

Il-y-a t'il un Olympe où il n'est de drapeau
Planté auparavant ; aux siècles merveilleux?

Disent les plus curieux, puis essuient un capot
Et se couchent devant ce siècle périlleux.

Et tous ainsi oublient leurs plus grand je serai...
Qu'ils juraient aux copains sous le préau, le ciel,
Et sur tout leur honneur, sur tout ce qui est vrai ;
Qu'ils marcheraient debout sous une pluie de fiel.

Tous ainsi dès que grands s'agenouillent en pleurs,
Et croient qu'avoir cru en l'ascension de la base
N'était que du gâchis, qu'une terrible erreur,
Qu'il faut vivre sans croire et faire table rase.

Ces gens là s'arrêtant au début du péril,
Qui du nouveau départ font la vieille arrivée,
De l'entente médiocre un pur et simple idylle,
Qui ont sur leurs orteils la pupille rivée

Qu'ils ne se plaignent pas de ne s'être battus
Quand il fallait se battre et qu'il fallait souffrir!
Qu'ils ne se plaignent pas de n'avoir de vertu
Qu'enfants à certifier qu'échouer c'est mourir!


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19 novembre 2009 4 19 /11 /novembre /2009 07:22
Vieux texte, plus d'actualité.

J'étais plus con que jeune...




Oui! C’est toi, merci…C’est toi, sainte femme,
Qui m’as fait sentir le profond amour…
Je mis de ma nuit dans ta blancheur d’âme,
Mais toi, dans la mienne, as mis le grand jour!
Jules Barbey D’aurevilly.


J’étais plus con que jeune quand, entre mille imbéciles, tu m’es apparue au travers d’un écran. Que tu étais candide… Ma pauvre âme insalubre ne valait  pas un soupir de la tienne mais tu m’as souris et m’as dit que j’avais tort de tant vouloir souffrir, que vivre de rancune ce n’est que mourir de haine, que je devais aimer les vivants car ils sont éphémères et me souvenir des morts car ils sont éternels…
J’avais un crâne bien vide… et toi un cœur bien plein ; si bien que nous avons échangé nos moitiés pour devenir complets, à deux nous étions enfin Un.
Tu étais un diadème d‘ivoire sur mon front d’ébène décharné! Tu étais mon contraste et ta très grande beauté a même charmé mes sœurs! La ville en nous croisant murmurait un rumeur jalouse: «Mais… Qui est cet astre au bras de ce vieux fauve aigri? Voyez sa chevelure: même la brise est honteuse de la caresser sans aucune permission! Et les montagnes peu fières de croiser un regard bien plus majestueux que la plus grande d’entre elles! Et la lune en veut à toutes les érosions de l’avoir faite moins ronde que cette croupe cavalière! Ah, qu’elle est magnifique! »
Mais moi ; plus con que jeune, je n’entendais pas les plaintes envieuses de l’univers. Je te croyais acquise, belle seulement pour moi.
Dans le brun de tes yeux, je n’ai vu que les flots transparents qui ont élever Narcisse. Et c’est le sang des naïades qui coule sur mes joues car aujourd’hui je sais que, loin de la source miroitante où se mire l’égo, l’amoureux devient laid.




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19 novembre 2009 4 19 /11 /novembre /2009 07:03
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19 novembre 2009 4 19 /11 /novembre /2009 05:01
La révolte des restes.




Les pieds frottants le sol et l'esprit au Nadir
Je cherche une grossière idée de mon bonheur
Et les camions à benne exhalant leur odeur
S'arrêtent au tournant avant de repartir.

Mais le dégoût m'épargne et va aux riverains ;
Boomerang pourrissant de leur vie consommée.
Quand  l'obsolescence éternelle aura sonné
Il sortira les morts du monde souterrain.

Un jour le vieux caviar et  le saumon pourri
S'amoncèleront et ne formeront plus qu'un
Géant de rose chair et d'esturgeons éteints
Qui broiera le portail de sa déchetterie.

Il ira par la ville empester les allées,
Frotter l’or des frontons, se coucher sur le marbre,
Briser sur son passage obélisques et arbres,
Trouver un gouffre humain pour entier l’avaler. 

Et d'immondes marées le suivront à leur tour ;
Les plats inaccomplis, les plats inachevés,
Les plats entiers, aussi, péremption achevée,
Et les plats noirs et durs carbonisés au four,

Tous ces abandonnés des palais et des bouches
Que les couverts d'argent ne pouvaient tolérer,
Ces oubliés lointains des lieux réfrigérés
Laissés aux estomacs des corbeaux et des mouches.

Ils s'amoncèleront à leur tour en géants,
En putrides tribus, en peuple putréfié
Qui forcera les dents des bouches pétrifiés
En quête de salut, de suc et de néant.


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11 novembre 2009 3 11 /11 /novembre /2009 08:16
A toi le poing levé.






Ce monde que nous dénonçons ,
Où l'exploité a le sourire,
Où tout espoir vient à pourrir
En puante contrefaçon

Nous y vivons et chaque jour
Amène l'homme  vers la nuit
Et nous puisons peur et ennui
Au puits où se tarit l'amour.

On nous dira que tout va bien
Et que tout est sous le contrôle,
Des déserts aux glaces des pôles,
De ceux qui ont tressé les liens.

On vous dira la vrai souffrance
Et vous, faibles bonimenteurs,
De vos chaires, de vos hauteurs
Vous tomberez à la décence!

Pis que la ruine financière :
Le dépouillement de pensée.
Ô vous salopards encensés
De nos demains, de nos hier,

Qui sans arrêt nous raccourcissent
Le temps exposé aux rayons
Et aux cordes de l'embryon
Lient l'abandon et le supplice.

"Abandonne tes beaux combats ;
Tout ici n'est qu’acquisition
Et devant nos réquisitions
Ôte ta langue du débat!

L'argent, le monde et le pouvoir
Nous accompagnent dans nos mains!
Tes cris, ton poing levé sont vains
Et nous rions de ton savoir!

La vie est ainsi petit être,
Toi, tu n'y changeras rien ;
Pour un qui briserait ses liens
Mille y succomberont peut-être.

Au diable ton obstination!
Tu succomberas jeune ou vieux!
Agenouillé, nu dans le cieux!
Errant sans détermination!" :

C'est le murmure des puissances
A l'oreille de l'insoumis
Dans le bruissement de fourmis
Des haines et des médisances.

Écoutes le car c'est la preuve
Que tu démanges leurs talons
Et qu'en rêvant dans leurs salons
Ils t'imaginent sous un fleuve.

Qu'on les chatouille et uns à uns ;
Un pied puis l'autre, dans leur chute
Donneront raison à la lutte
Contre le marché de l'humain!






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7 novembre 2009 6 07 /11 /novembre /2009 05:59


Je suis un jeune veau ; je ne t'ai jamais lu.
Car le triste tropique incise un ciel lointain
Encore. Je lirai du Levi-Strauss demain...
Amer à dire, en fait, mais je t'ai attendu.

Des pages ne m'ont pas dévoilé L'Homme nu...
Sûrement cicatrisé et de tous les teints,
Quel poitrail palpitant selon toi est le sien?
Quelle vérité Claude, as tu donc détenu?

Qu'as tu donc emporté de ce monde déchu
De lumière au sommet, ne serait-ce ténue,
D'un horizon quelconque et d'un quelconque frein?

Peu à peu nos penseurs, qui accueillent les nues,
Quittent la plume et l'oeuvre. A jamais retenus
Dans l'Histoire ; il ne meurt aucun grand écrivain.


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4 novembre 2009 3 04 /11 /novembre /2009 08:11
Incantations - IV :
L'incendie.




Qu'il ne reste que cendre et sanglots vaporeux
Des avenues, des monts, des plaines, des forêts,
Des étages derniers, des recoins d'amoureux
Et des tombes jonchées de fleurs et de regrets!

Que l'ombre disparaisse à travers la flambée!
Qu'un lierre rouge, avide, acharné et véloce
Rampe sans direction pour toute l'absorber
Sans avertissement comme un soleil précoce!

Le vieux chêne et le buis ensembles dans la braise
Sont confondus comme ils ne l'ont jamais été ;
Le chêne paternel s'effondre dans son aise
Et le buis dans sa gêne a le bois effrité.

La jungle et la forêt sont pillées de l'empire
De loups et d'arbrisseaux, de baies et de dryades,
Hérité de Gaïa dans son premier soupir
Par ce lierre barbare aux rouges embrassades.

De leur legs il ne reste au sol que de la cendre ;
Des arbres éternels du charbon pailleté,
Des antres des boas, des noeuds de scolopendres :
Une poussière grise, acide, inhabitée.

Et le lierre s'étend, se répand sur les plaines,
Tour à tour, une à une enflamme leurs brindilles,
Les taureaux et les vaches aux mamelles pleines
Avec les troupeaux fuient, l'épouvante aux pupilles.

Il se répand aussi sur les dénivelés,
Sur les flancs des monts il fleurit ses grandes flammes,
S'il ne peut atteindre les cimes gelées
Il fera le contour du sommet qu'il entame.

Il serpente à travers les massifs inconnus,
Escalade en fumant le front abrupt des chaînes,
Effleure les ravins et caresse les nues
Et éteint la croissance des montagnes naines.

Des massifs il déferle, incandescent et brut,
Sur la panique inerte affichée aux visages
De la race de l'homme assistant à sa chute,
Brûlant dans ses rameaux, mourant dans ses branchages.

Les carcasses de cars rougeoient et les maisons
Sont autant de semis d'où germent des foyers.
Dans ce chaos ardent fiévreux de déraison
Une voix retentit : Appelez les pompiers!





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3 novembre 2009 2 03 /11 /novembre /2009 06:13
Incantations - III :
La mer.



En partance à jamais à bord d'un lourd rafiot,
Bonne proue brise et tranche, avance et ne romps pas,
Avance aveuglément sur l'étendue des eaux
Vers l'étoile, la fin, le lieu qu'aucun compas

Ne peut tracer en noir sur une feuille blanche.
Et le sel au visage et les lèvres gercées,
Ton vieil imperméable qui n'est plus étanche
Sur le dos, tu t'en vas. Il reste à traverser

Tout l'azur infini qui tapisse la mer.
La mer où tu louvoies et qui navigue en toi ;
Ton coeur est un écueil, une marée amère
Le submerge souvent de désir et d‘effroi.

Être seul est sur terre un rare privilège ;
Tu as erré longtemps parmi les gens honnêtes
Qui d’immeuble en gratte-ciel et de siège en siège
Se cherchent une place où relever la tête.

 Fuir un bled barbelé, la cangue familiale,
La promesse aux amis qui n'est jamais tenue,
Une routine hantée de relations triviales,
La pudeur sans égard d'un amour qu'on veut nu!

La mer! L'eau seulement! Plus le moindre visage!
Et puis le ciel, l'ondée, les nuages mouvants,
La courbe à l'horizon dépourvue de rivage,
Comme actualité les nouvelles du vent.

Un orage au lointain prépare sa conquête,
Il se charge de noir, d'effroyables lueurs,
Et d'orage il devient une proche tempête
Qui vomit des éclairs et rugit de fureur!

Matelot à la barre! Assume aussi la mer
Avec ses titans d'eau qui se lèvent, s'effondrent,
S'éloignent, se côtoient dans le bal du tonnerre,
Et dans  le tempo se mêlent à se confondre.

Assume cette mer! La mer irrésistible!
Dans les grands roulements le crachat de l'écume,
Ces titans meurtriers qui n'ont aucune cible,
Le ciel pesant et noir que les éclairs allument.

Trop tard ; la fin est là, l'étoile à tes paupières,
Tu sombres les yeux clos loin de tout littoral,
Ta proue flotte en morceaux, en fragments, en poussière,
Et tu pars à jamais pour la mer sépulcrale.






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31 octobre 2009 6 31 /10 /octobre /2009 06:08




Incantations - II :
La vieillesse.




Chêne à la bonne foi que tes rides sont belles!
Tu as germé croyant, fragile et hésitant,
Pourtant tu pries encore, immense et solennel,
Lorsque je te consulte à l’aube du printemps.

Tu as grandi, vieilli avec la sainteté.
Vieilli... Et tous les jours! Ton feuillage a noirci,
Tes branches sont courbées ; tu vieillis et l'été
Ne t'épanouit plus mais frappe sans merci.

Qu'as tu vu dans la plaine où tu vis isolé?
L'envol lié et délié de quelques tourterelles
Qui se suivaient au loin par l'amour enrôlées,
Dont une revint seule après une querelle?

Est-ce que tu as vu les faons qui s'essayaient
A leur première course, à leur première chute?
Est-ce que tu as vu les faons qui s'asseyaient
Et n‘ont pas su courir face aux crocs de la brute ?

As-tu vu le serpent engloutir le mulot,
Le serpent déchiré par les dents du furet,
Le furet surpris par l'aigle venu d'en haut,
Et l'aigle agoniser, le plumage en duvet?

Du temps de ton baptême et de tes confessions
Tu gardes ton bois pur et ta foi infaillible ;
Si l'époque te nuit sans nulle concession
Tu as sur ton branchage un oiseau invisible

Qui te garde debout. Tu lui parles parfois,
Quand tout est décadent, quand tout te déracines,
Quand tu pleures la sève accumulée en toi,
Quand la mélancolie joue sa note assassine.

Tu t'attendris encore avec un souvenir
Du temps où tu poussais ton bourgeon initial,
Du temps où, vieux fayard, tu avais su tenir
Face aux assauts nombreux des haches de métal.

Tu frémis du feuillage et quelques feuilles tombent...
Tu es tendre vieux chêne, et ton conseil est bon;
Tu ne portes sur toi que les nids des colombes
Mais le corbeau se tait au creux de ton pardon.

Cet hiver, de nouveau, emportera ces ailes
Et tu restera là, squelettique et gelé.
C’est ton destin, vieux chêne, et il est éternel :
L’arbuste neuf et vert doit aussi s’y plier.


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