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18 février 2010 4 18 /02 /février /2010 03:40

Fragments d'un texte raté :

Evidemment! Une fois sorti du contexte...

fragmented by meggert
Par ~meggert

[…] Refrain irrégulier de pages qui se tournent. On est las sur le chemin de la nuit ; las d’écrire, de lire […] Il faut prendre le temps de tout arrêter. Las de penser  […] Le seul film muet qui se regarde volontiers, dans cette époque où il faut parler pour être entendu, est pornographique ; car il ne faut ni inquiéter ni exciter le voisinage quant aux hurlements orgiaques.[…] Les grands textes m’exploitent comme une bête à admirer […] L’errance sociale? L’indiscipline? Le poulet braisé ou la vengeance de tout un continent sur son édifice? […] Car l’humain ment le jour sur son vice et la nuit sur sa vertu. […] cette adolescente pourrie sur pied par le fumier des drogues qui oubliera sa veste en partant mais pas le fœtus naissant en elle.  Les boîtes de nuit sont des massacres. […] j’aime mieux le cliquetis des lames, qui change l’histoire sans émettre de frisson rose au cœur des jeunes filles […] Je ne théorise pas mes fins de mois, je les vis […] Allons, dans le bruit et la sueur, conquérir des renommées belles et durables![…] Je vais, dans la lumière des facettes.[…] Ce sont des objets. Elles s’instaurent comme tels sur les pistes. Des objets flamboyants et magnétiques […] J’aime la notion d’aura, cette idée qu’avant de parler ou d’agir un être exceptionnel puisse être reconnaissable d’instinct. Mais l’homme, bête instruite, qui s’instruit et instruit les autres s’est trouvé d’autres moyens de reconnaissance que l’instinct donc aujourd’hui tout aura se précède d’une renommée, l’inverse eût été possible chez l’homme bestial, naïf et incestueux. […] Celui qui aborde l’histoire des idées et la nécessité d’appréhender la culture et l’engagement solidement structuré tels que des sanctuaires de jouissance et d’union plus que comme des caveaux verrouillés, ouverts seulement aux universitaires et aux vieillards. 




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Par ~Nicasus




 

 

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12 février 2010 5 12 /02 /février /2010 05:46

Chronique du temps : Extension du prélude.
La Femme.


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Vint la sainte vertu et le mauvais augure,

Vint le corps arrondi aux courbes hypnotiques,

Vint la chair asservie et l’esprit despotique,

Vint le croc dans la pomme et l’unique rature.


Sur le navire monde aborda la crinière

Lourde et éparpillée aux ondes aériennes

Où l’on passait la main dans les orgies païennes

Et qui tombait au front aux chaises de prière.


A la toge la robe ajouta ses dentelles :

Elle virevoltait au rythme des grands vents

Et laissait s’envoler aux brises les volants

Quand les vents s’apaisaient sur l’esclave éternelle :


L’esclave à la couronne et au port de princesse,

La reine amenuisée par son ventre gonflant,

La sorcière qui rit lorsqu’on perce son flanc

Et, dans les vapeurs bleues, la savante prêtresse.


C’était la sœur du chef, la mère du sous-fifre,

La fille du doyen, la femme du guerrier…

Elle était celles-là mais n’eut pour seul métier

Que de compter les morts et de graver les chiffres.


Pour elle l’on armait le plus puissant soldat

Et il allait au front au nom de sa beauté

Et hurlait, le corps rouge et l’âme sabotée :

Hélène! Ici je meurs! Hélène… et c’est pour toi!


Et de l’autre côté elle était Pénélope ;

La patiente et fidèle épouse du seigneur,

Qui tissait, espérant le retour et son heure,

En brulant les mots d’amour et leurs enveloppes.


Elle était l’angélique apparition, la foule

Tombait à deux genoux et ses larmes taries

S’écoulaient lourdement aux genoux de Marie

Dont la grâce attirait les pleurs qui se refoule.


Elle était majestueuse au sommet de sa caste!

A son trône enlacée ; serpent qui se délasse,

Elle était l’incestueuse oubliant la menace

Mais aussi la Pythie qui avertit Jocaste!


Elle était cette folle intransigeante et sourde

Aux voix de ce bas-monde et au discours humain

Et, à l’âme son dieu et son glaive à la main,

Jeanne d’Arc s'en allait défendre Greux et Lourdes.


Elle était le prêtresse éternellement vierge
 

Qui ne connût que foi et terrible abstinence

Et l’ombre de son temple animée par la danse

Sans rythme des parois à la lueur des cierges.

 
Elle était celles-là mais n’eut pour seul métier

Qu’un martyr incessant, qu’un tourment de toujours…

L’homme la remercie de lui donner le jour

Et d’être la lumière essentielle au foyer.



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4 février 2010 4 04 /02 /février /2010 18:20
Styxs - II :
La traversée.

Charon 12 07 08 by gygr
Par ~gygr.

Charon vint à ma rive avec sa lourde rame,
Le flot rouge à sa poupe était le sang des drames
Naturels ou voulus accumulés depuis
Le pavage du sol et la percée des puits.
Il arriva  à moi, hautain tel qu'un grand dieu.
Lui, le pauvre passeur ne gouvernant ni cieux,
Ni océan, ni terre et seul sur son navire
Lorsqu'il revient chercher le sou pour le ravir
Aux dents du macchabée qui patiente son tour
Et regrette en pleurant le dernier de ses jours.
"C'est à toi", me dit-il, pointant son doigt infect.
"A moi?", j'ai vérifié ; la chose était correcte :
C'était  à moi d'aller rejoindre les enfers,
A moi, un condamné de plus marqué au fer
De mon humanité et de sa décadence ;
A moi d'aller m'asseoir et de quitter la danse.
J'avais le sou, ma mère avait pris le grand soin
De le mettre à ma bouche asséchée de défunt,
Et je lui ai donné comme on serre les doigts
En prenant la poignée d'un ennemi de choix.
Charon! Seconde main de la tâche finale!
Petit exécuteur du cycle machinal
Qui va de l'au-delà au cri du nouveau-né!
Charon, simple passeur pour qui a la monnaie!
Là voilà ta piécette! Et qu'en ferais-tu donc?
Tu vis l'éternité à bord de cette jonque!

Et je montai à bord à mon tour mais le temps
De cette traversée (l'ultime) seulement.
On voyait dans le sang que le fleuve écoulait
D'étranges noyés : Les morts démunis d'argent ;
Des spectres blancs et noirs portés par le courant
Vers des éternités douloureuses, violentes...
C"étaient les pauvres morts qui errent et qui hantent.
Lorsqu'ils heurtaient le bois de la jonque en passant
Charon les repoussait d'un coup de rame et sans
 Se soucier de leur deuil qui jamais n'a été,
Eux qui valaient cent fois un seul roi étêté.
Nous allâmes à bon port : au seuil de l'enfer
Il m'y posa et s'en alla chercher un frère.
De ma rive je vis le nouveau supplier :
Il n'avait pas le sou et Charon l'a noyé.

Haron by anriyn
Par ~anriyn.








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3 février 2010 3 03 /02 /février /2010 05:08
Je te hais.

Hate by See Emily Play
Par ~See-Emily-Play


La vie est mieux sans toi, ta présence encombrante
Est pour moi un fardeau. L'univers dans tes yeux
A absorbé le mien et ton corps délicieux
A absorbé mon âme avant qu'ils ne me hantent.

Je n'étais plus le même au devant de tes gestes,
Des envolées d'oiseaux que suggéraient tes pas,
Femme mirobolante! Et si tu n'étais pas
J'aurais bu volontiers une gorgée de peste.

Tout ce que tu disais, le moindre de tes mots,
Résonnait le bon sens et la bénédiction :
"-J'étais en boîte hier. -C'est flou! " Et la passion
Dévorait tout le sens de mon moindre propos.

Face aux autres j'étais une ombre dans ton ombre,
Ton serviteur aux pieds et aux poignets liés,
Le sol à ta semelle et ton seul  palier,
Ton chien de race pure et ta force du nombre.

Et tu me promenais entre les magasins,
Pour que je ne fuie pas tu me comblais de sacs
Remplis de vêtements, de parfums et de laques
Que je t'offrais, heureux d'être ton petit rien.

Car tu ne donnais rien et je t'épargnais tout :
La brûlure à la flamme égoïste et jalouse
Ne dévastait que moi et toi, l'ancienne épouse,
Tu venais m'embrasser, un suçon rouge au cou.

Et pour le mettre loin de mon coeur rançonné
Je t'emmenais mirer dans les bijouteries
Y chercher mon pardon pour cette étourderie :
La rivière d'argent qui t'avait étonnée.

J'aurais bâti Pékin pour voir tes paupières
Envelopper tes yeux à l'heure du sommeil.
Je ne considérais qu'une seule merveille
Et ne confiais au ciel qu'une seule prière :

"Ah! La revoir enfin! La revoir! Un instant...
Quitte à ce que l'enfer remonte à la surface,
Qu'il brûle le dernier enfant de notre race!
Quitte à tout effacer et mettre un terme au temps!"


Pour toi? J'aurais tuer, mais ça s'est déjà dit,
J'aurais tout planifié pour contrôler le monde ;
La taille de la vague et la portée de l'onde,
Et changé la planète en ton seul paradis.

Qu'aurais-je fait encore? Égorgé quelques phoques,
Le sanglot retenu, et cousu des fourrures
Pour te couvrir l'hiver de nouvelles parures.
J'aurais fait pire encor : J'étais ton chien sinoque.

Tu comprends que ma vie puisse être mieux sans toi?
Qu'entre l'homme et le chien il y a mille races?
Et qu'aucune n'atteint la dignité, l'audace
Et la partialité de l'homme et de ses lois.

Alors je t'ai quitté en lâchant les cabas,
Le collier à mon cou m'a traversé la gorge
Et je n'ai qu'aperçu la lueur de la forge
Qui travaillait tes nerfs devant mon branle-bas.

Et je ne te vois plus, et ça me rend humain,
Ma vie est mieux sans toi, je passe tous mes tours.
Comme on dit de partout : L'amour s'arrête un jour ;
J’espère t’oublier... demain... après-demain...


Love and Hate by Nosirhgios
Par ~Nosirhgios.








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2 février 2010 2 02 /02 /février /2010 18:34
Noyade :

La mer est sépulcrale aux yeux de l'hydrophobe ;
Elle échange aux poumons de l'air contre de l'eau
Et la vie s'y enfuit à l'intérieur des globes
Qui des lêvres s'extraient pour un ultime mot.

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Dessin : Dynoknu.




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2 février 2010 2 02 /02 /février /2010 04:36
Le romantisme pour les nuls :

Je t'aime d'amour mon aimée
Et mon amour énamouré
De part le ciel sera semé ;
Jusqu'à la mort je t'aimerai.

Love by azzriel666
Peinture : Azzriel666.
(On ne sait jamais...)



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31 janvier 2010 7 31 /01 /janvier /2010 20:55
Sinon tu seras mangé tout cru :

Le-petit-Chaperon-rouge


Je me relis souvent, à l'affût de mes fautes d'orthographe et de grammaire, à mon âge je découvre toutes ces histoires subordonnées et conjonctives... mieux vaut tard que jamais et c'est tout. Je me relis aussi en quête de tics, d'univers continus et d'invariants polymorphes. En quête de ce que je diffuse parmi ce que j'assène ; ce qui vient tout seul, les mots que je ne contrôle pas : Je me relis pour voir qui je suis.
Et j'ai vu que je mangeais beaucoup d'enfants, qu'ils finissaient souvent par se faire bouffer par un animal ou un homme. Ce n'est pas grave ; les enfants sont faits pour être mangés.


                                     hansel gretel arthur rackham1
 
   Par
bonheur mes parents ne m'ont pas dressé à ce fouet là mais il est normal, chez l'adulte, d'expliquer à  sa progéniture qu'il sera mangé tout cru.  J'ai tout de même connu ces  contes qui mettent en scène des gamins pauvres et tristes sur qui le destin fait tomber un ogre ou une sorcière qui veut les avaler. C'est comme ça ; pas de jeunes héritiers élégants et exécrables pour les estomacs des monstres. Il est vrai que priver de dessert celui qui a perdu ses deux frères lors de la famine, sa soeur morte née et dont les parents se sont débarrassé pour vivre mieux n'est pas très convaincant, mais tout de même! Pourquoi le manger? Pourquoi, pour le punir d'être misérable et soit trop gourmand, soit trop curieux, ne lui donne t'on pas une petite tape sur la joue avec une engueulade? Non, il doit se faire manger. Et nous aussi.
Si on regarde sous le lit, ce qui est immoral en soit, on se fait manger, si on regarde dans le placard on se fait manger, si on va dans le grenier on se fait   manger, si on dit des gros mots on se fait manger et le pire : des jours où ils sont pris de névrose nos parents nous courent après en hurlant je vais te manger!
L'immuable destin de qui est encore loin de la puberté est de finir dans le ventre de quelque chose ; une vie peu enthousiasmante scellée par la peur, un cheminement d'angoisse entre des milliers de mâchoires.

   Et le temps passe, on pousse de sales boutons, on se met à fumer, on porte un appareil dentaire, on devient incomestible pour les monstres et les parents... Et ça tombe bien car on s'est rendu compte que la société allait nous phagocyter tendrement jusqu'à notre mort, alors le croque mitaine et le clown aux canines de sabre n'ont plus que la prestance de gentils animaux de la forêt. Si on a survécu...

   Je rend ici hommage à mes camarades partis, ayant regardé sous leur lit ou ayant dit « merde », amen.


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30 janvier 2010 6 30 /01 /janvier /2010 20:04
 
Tintin aux pays du droit d'ingérence :




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Cela fait longtemps que je n'ai plus lu Tintin, c'est dommage... J'ai pourtant tout lu de cette oeuvre rocambolesque d'Hergé ; la fois où Tintin se fait enlever et qu'il s'en sort de peu à Washington, la fois où Tintin se fait enlever et qu'il s'en sort de peu à Hong-Kong, la fois où Tintin se fait enlever et qu'il s'en sort de peu sur la lune et encore! Tintin c'est San-Antonio sans caractère, avec un Capitaine Hadock maintes fois plus civilisé que Bérurier.
Tintin et San-Antonio sont très intelligents mais ils ne comprennent rien sans se faire enlever et molester, c'est assez pervers. Mais celui  à la houpette reste le meilleur, c'est un sacré reporter qui ne va jamais voir son rédacteur en chef pour savoir si son papier est bon  mais qui vous retrouve tous les trésors perdus, même les cargos de came! Il a un budget illimité et se fait employer par des organisations secrètes japonaises, il va en Afrique faire ingérer des  éponges à un léopard pour le faire gonfler, il y vide un gorille de sa chair pour s'y faufiler, il se contrefout des états généraux de la presse!

                         tintin 2-2

   Au Congo (car c'est au Congo qu'il va, c'est un Congo très symbolique) il a un comportement étrange : il prononce les "r"... Il fait d'autres choses aussi ; il sauve tout ce qu'il croise, sans lui le continent aurait implosé. Le plus drôle c'est cette scène du chapeau où il sépare la couronne du haut afin d'exercer un partage égal ; ainsi l'un attrapera une insolation par le sommet du crâne et l'autre par le front. Tout se partage! J'ai pris cela au mot en offrant un chat à deux soeurs..; tout le monde a pleuré.
Et il se fait missionnaire, d'un coup! Tireur d'élite hier, théologien aujourd'hui : c'est là le charme de notre "reporter". Il arrive en classe et s'apprête à enseigner quand ce foutu léopard déboule, alors là c'est splendide ; Tintin, arrivé il y a quelques jours de Moulinsart ou de je ne sais où, maîtrise le danger mieux que tous les congolais réunis. D'habitude, en son absence, le léopard mange un enfant.

  Et c'est là où nous sommes. Tintin c'est l'Amérique, pour qui il ne partage pas de chapeau, et ce un peu partout dans le monde, là où venir tuer des léopards pour enseigner le judéo-christianisme, tout ivre qu'il soit, est prometteur. C'est la France aussi, toujours là pour fournir des éponges et des Bibles. C'est beaucoup de pays. Mais Tintin est gentil et il rend les gens heureux, lui qui passe son temps à travers le monde à fuir ses deux mioches et sa mégère qui lui demande de payer la pension pour les nourrir.

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Dessin : Hergé. (De toute façon si il lui venait l'idée de porter plainte il perdrait : Les absents ont toujours tort)

 

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30 janvier 2010 6 30 /01 /janvier /2010 04:52
Trois jours dans le désert :
Jour un.

Trois ans dans le désert. Je me fais chier. Je crois m'amuser à viser un rocher avec des cailloux, si je le touche j'aurais gagné le droit de chercher une autre édifiante occupation. Trois ans que je ne l'ai pas touché.
Avant que la nuit ne tombe je peux jeter beaucoup de cailloux, j'irai les rechercher quand ma réserve sera toute lancée. Ce sera une belle promenade.
Pour manger j'attendrai, cette espèce de coyote que j'ai piégé ne me permet pas de faire bombance, je dois le manger vite pour ne pas en mourir, mais judicieusement ; par petits bouts, pas par membres. Pourtant, c'était un bébé. J'ai faim, mais j'attendrai.
Pas trop. La survie est une question de dosage : Si j'attend trop je m'effondre et ses parents, de bons parents, me dévoreront. Si je n'attend pas assez j'aurai faim plus tard, atrocement.

  Si cela fait trois ans que je n'ai pas cherché d'autres morceaux de déserts  que celui que couvre mon regard, c'est qu'ici  j'ai de l'eau. Il y a, entre deux pierres jaunies, comme un petit puit ; on y passe juste la main et l'on en prend dans le creux de notre paume, ce sont de petites gorgées qu'il faut boire par cent pour ne pas se déshydrater.
J'habite autour ; un petit amas de pierres, on peut en voir deux dont une moins haute que l'autre et au dessus plat qui sont ma chaise et ma table, on peut en voir une autre grande et large qui m'apporte l'ombre vitale, et une autre, au dessus plat également, c'est mon bureau, on peut voir aussi un cercle de pierres arrivant au genoux ; c'est une cuvette, ainsi que deux longs rochers entre lesquels est mon lit. Quand je travaille je déplace ma chaise jusqu'au bureau ; c'est éreintant, compliqué, douloureux mais ça me laisse un corps apte à fuir les bêtes.

  Je n'attend pas d'aide, c'est trop tard. Je ne veux pas mourir pour autant, c'est aussi trop tard pour cela. Le temps a tranché ; je ne me suis pas vu vivre et j'ai continué. Désormais tout ne sera que désert, le temps est injuste. Je le compte sur mon ombrelle minérale avec des rayures mais je n'ai rien vu venir. J‘ai pris mes habitudes et je chie face au ciel.
Au début, je n'osais même pas, je me disais, comme civilisé, que j'attendrai d'être dans des toilettes convenables... ma civilité a  basculée à la première flatulence malencontreuse... palpable, pour tout dire. Je suis un homme libre et odorant.
Et le désert est une telle atrocité, lorsqu'on le souffre dénué de connaissances et d'équipements, que ni l'ennui, ni la faim, ni la soif, ni le manque d'hygiène ne sont des ennemis assez cruels. Je les redoute moins que le sable. Moins que le sable étendu qui ne se laisse pas fixer et  qui brûle les pupilles, que le sable qui tremble et coule contre les ventres des crotales et des scorpions qui s'en extraient, que le sable qui frappe de ses grains votre chair à la vitesse du vent jusqu'à vous l'arracher.
C'est tout. Le sable ne fait rien d'autre, si il ne me tyrannise pas c'est que je suis mort.

  J'ai jeté tous mes cailloux, je me lève et je les ramasse. Il ne doit en manquer aucun, j'en ai cinquante et un et si ce ne sont pas exactement ceux là que je récupère je cherche les manquants. Parfois des jours entiers. Je les ai tous, je passe un regard sur le désert, il ne me montre que mon aveuglement précoce. Je retourne m'asseoir. Je jette la première pierre. Après ce tour, je mange.
Plutôt que de la manger j'ai  déjà essayé d'apprivoiser une bête qui ne me faisait pas envie ; j'en ai saigné trois jours, plus tard je l'ai bouffé par vengeance mais elle était malade. La pire année de ma vie. Et si j'y étais parvenu elle ne serait pas rester ; ça pue moins chez ses pairs et on y mange mieux.
Le tour est fini. Il me manque un caillou! Il devrait être par là... ah, c'est lui! Mm... non! Alors par là peut-être... C'est celui-ci!.. Même pas! Où il est bordel! J'ai faim! Ah! Le voilà! Oui... Quoique... Je ne me souviens pas de cette fissure... C'est pas celui-là.
Impossible de le trouver!
 
  La nuit... Le soleil était plaqué au fronton du ciel au moment où j'ai perdu ce caillou. Il me donne du fil à retordre. Je reprendrai les recherches demain. D'abord il faut manger, les mouches affluent.
Le petit coyote est bien daubé... Il en a le goût. Je trie les déjections des vers de la viande. J’ai de quoi remplir deux poings. J’ai beau avoir faim je jette le reste. Sinon les vers, je les ai au ventre. La qualité du parasite est d'être invincible, il y a des vers et des cafards au coeur du soleil. Et c'est avec eux que tout s'achèvera, quand tout sera plus vide que le désert et que je le regretterai. Ils grouilleront dans la poussière de l'humanité dans l'attente d'un autre empire pour lui ronger les orteils. Il tombera de lui même et ils le mangeront en entier, et ils le défèqueront sereinement. Je préfère les éviter.
Maintenant je n'ai plus rien à mangé et les vers mourront où ils sont nés : Un lieu d'abondance et de gastronomie continue.

  Je raie un nouveau jour sur mon grand rocher et vais au lit. Un tas de peaux diverses, de chacals et de coyotes ou je ne sais quoi que j'ai tué, est ma couverture face aux froideurs de la nuit. Le désert est une horreur. Je m'endors pour mieux le haïr demain.



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30 janvier 2010 6 30 /01 /janvier /2010 04:38
 
Trois jours dans le désert :
Jour deux.

Ca brûle! Mais ça brûle! C'est quoi? Du sable. Merde.
Quel rêve faisais-je pour l'oublier? Il est si présent qu'au réveil il m'efface de l'esprit ce qui n'est pas jaune, minéral et en grain, j'ai rêvé, c'est sûr ; mais de quoi? Il fait... chaud. Je me mets à l'ombre. Je cherche les bribes de ma nuit. Rien. Tant pis : Place au rituel!
Je m'allonge au plus près de la pierre à ombre et c'est parti! Et une, et deux! On accélère progressivement... Une, et deux, une, deux,  un'deux, un'deux, un'deux, un'deux, un'deux! Une... deux! Je suis saisi d'un vertige, mon corps se crispe et mon âme dégouline! Ca palpite entre mes doigts! Je serre entre le pouce et l'index : Et une, et deux. Mon sphincter ne laisse plus rien passer, contracté au maximum tout le plaisir et pour moi. Mes genoux se soulèvent par à-coup et une onde puissante se transmet jusqu'à mes cils! Mon coeur frappe à ma cage thoracique pour pouvoir s'envoler! Et une... Tout est sorti.
Je ne prend jamais assez mon temps pour ces choses là.
Je me lève, secoue le tout et remet mon pantalon. Je me sens bien.
Je vais chercher un peu le caillou d'hier avant d'aller travailler. Il me semble qu'il était par là... Oui! C'est lui! Je le range. Une excellente journée qui s'annonce! Allez, au turbin!

  Je travaille jusqu'à ce que le soleil ne me le permette plus. J'ai bien avancé ; je peux désormais jeter mes cailloux sur mon rocher et tout cela est satisfaisant.
Voilà dix tours de passés, pas un de perdu, la vie est belle.
Il est temps d'aller chasser, si ce bonheur est une ligne droite je devrai trouver les parents du petit que j'ai partagé avec les vers. Je saisis ma pierre-arme ; pointue et très solide c'est ma seule défense. Je pars.

  Mon territoire se limite aux endroits d'où je peux voir ma maison. En cas de tempête je n'ai qu'à rester stoïque et je retrouve mon domicile sous le calme du vent. Au delà j'y ai passé trop de temps, ignorant tout sur tout, et mon point de départ, et mon itinéraire, et mon point d'arrivée. J'ai ici un endroit où je peux circuler librement, car j'y ai des frontières. C'est une partie du désert moins horrible que le reste.

  Pour chasser, je me place en haut d'une dune et j'attend que passe un chien sauvage. J'ai bien pensé à amener mes cailloux et mon rocher, pour patienter, mais une tempête pourrait disperser mes projectiles à tout jamais.
J'attend.
En voilà un! Je célèbrerai ce jour et le graverai fort bien! Ils est plutôt loin. Je place les ossements de mon repas à côté de moi et prend le temps de m'ensevelir complètement. Un grand vent et c'est la mort, c'est le risque à prendre.
J'attend encore.
Il arrive qu'ils ne viennent pas, qu'ils aient déjà mangé où qu'ils perçoivent le traquenard. De plus, je n'entend rien. Il faut que je les sente me piétiner.
 Le temps passe, sûrement. J'ai peur du sable... Et si jamais je m'enfonçais là dessous et qu'il m'enterre vivant? Et si le bout de ceinture roulé qui me sert de tuba s'obstruait? Et si je m'asséchais, si l'eau de mon corps était drainée? Vite! Qu'il arrive!

                                                    nikkiburr Mr Coyote Face

  Il est arrivé... Je sens : Deux, trois, non... Deux pattes! Ah, quatre... quatre. Crac!
Je l'attaque par dessous, en lui immobilisant la gueule d'une main et en lui fendant le crâne de l'autre. Le petit aboiement aigu, plaintif et bref que j'entend à ce moment fait toujours sont petit effet... Mais là elle est morte, car c’est une femelle, la langue collant au sable.
Elle est plutôt grosse, c'est une bonne chose. J'ignore si elle est parente du bébé, je ne sais même pas si ils sont de la même espèce ; c'est de la viande dégueulasse, voilà tout. Qu’elle eût mangé les restes de sa progéniture n'aurait rien d‘extraordinaire. Ironiquement, elle lui succède. Je la ramène sur mon épaule, le sang coule. C'est qu'elle me lâche un son! Un ronronnement. Je la balance à terre et lui assure le silence à coups de pied dans son ventre. Qui se ramollit au fur et à mesure.
Avant d'être mangé il faut mourir et être mort depuis un certain temps. Je n'aime pas la viande saignante, surtout à flots. C'est fini? Plus de ronron? Bien.
Je la rapatrie donc à la maison, la pose sur le sol, lui ouvre la cage thoracique à l'aide de ma pierre-arme et, surprise, j'en ai deux pour le prix d'une! Un foetus bien développé s'effondre de ses entrailles. Je le mets de côté et je vide la bête de ce qui n'est pas du muscle et de l'os. J' y balance trente mètres plus loin et laisse un sable marron et rouge où je m'essuie les doigts, je me les passe ensuite dans l'eau.  Je prend quelques grosses pierres, brise le reste de ses côtes et les dépose sur son flanc afin de fermer ma conserve. Je verse du sable dessus. Elle tiendra deux jours, au plus. Son gosse fera un repas.

                                                       Thinking Of You by Isetoo

  La nuit étale les premières dentelles de sa robe. J'aime le soir, il ne fait ni trop chaud ni trop froid, le sable devient confortable. Je m'y allonge et attend le débarquement de la lune. Je réfléchis. Suis-je capable de retourner parmi les hommes? Je suis passé par le désespoir absolu. J'ai mené une vie sans dénouement, aucun. J'ai tiré par la queue un gros lézard et je l'ai mordu à vif, j'ai croqué son estomac pendant qu'il gesticulait, je l'ai tout mangé, j'ai recraché ses yeux et j'ai roté. J'ai dormis et me suis réveillé sous les dents et les becs des charognards. J'ai mâché et digéré une partie de ma chemise... Quelles conversations pourrais-je tenir?
Et puis il n'y a pas que ça... Je ne regrette rien du monde civilisé. Je devrais peut-être pleurer les îles flottantes ou le corps des femmes, faire le deuil de certains yeux qui  plus jamais ne me verront, frapper le sol de poing de n'avoir rien été avant de disparaître, souffrir et souffrir encore au souvenir de l'instant crucial qui m'à amener jusqu'à aujourd'hui. Rien.
Je devrais peut-être me parler d'amour, me dire qu'il y en aura un peu pour moi car j'en mérite comme tout le monde... Mais bon, m'en donnera-t-on pour autant?
En ai-je à donner? Quand, entre l'abattage de coyote errant et l‘indigestion monstrueuse, ai-je emmagasiné de l'amour à redistribuer? J'ai l'impression de m'être en tous points opposer à l'homme tel qu'il est devenu lorsque tous mes problèmes se sont résolus dans un tas de viande et une source d'eau... Si j'ai de l'amour, pourrais-je lui en donner?
Suis-je capable de ne vivre qu'à travers des cycles, moi qui ai connu toutes les longévités? La mode, la grande idéologie, le visage sous les projecteurs, la direction des sentiments, l'humeur, les moeurs mauvaises et les bonnes moeurs, la destination rêvée, la médecine efficace, ce qui est drôle et ce qui ne l'est pas, la cible de l'indignation et la durée de vie conseillée ; tout fluctue perpétuellement chez les hommes. Chez moi, tant qu'il ne pousse pas de jambes aux pierres et que le soleil n'explose pas, je peux dormir tranquille. Ce que je fais après avoir profondément gravé cette journée.


J'ai entendu des pas! C'est sûr, je... Bordel, je vois rien! J'en suis sûr... C'était un frottement régulier et ça s'enfonçait davantage que les canins... Mais qu’est-ce qu’il se passe! C’était bien des pas! Des pas de quoi? J’ai envie de le crier, je me retiens. Je regarde de partout, mes pupilles ne veulent pas s’adapter, je me lève et fais un tour dans les parages... Rien de louche. Mais c’était quoi ça? C’est pas possible! Qu’est ce qu’il s’est passé? C’était des pas humains, comme les miens! C’était tout près. A deux mètres! Mais c’est pas possible!
Oui. Ce n’est pas possible... Il faut que je me calme. Il n’y a personne pour marcher ici à part moi, ça fait longtemps que je le sais. Je me recouche et tente de retrouver le sommeil.
Les traces ne s’effaceront peut-être pas pendant la nuit, je saurai demain.







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