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27 juin 2013 4 27 /06 /juin /2013 15:27

Ce poême est un texte de circonstances, les circonstances s'étant barrées je me vois dans l'incapacité de le finir, juste en livrer "l'idée".

 

Sans que jamais ne puisse un soupçon de l'Archange

Choir et fleurir à l’horizon des champs de blé

L'enfant du désaccord admis, que tout dérange,

Bannira les venins dont naître l'a comblé.

 

La vie avec les autres qui ne sont ni cygnes

Ni fauvettes au front de l'aube, des degrés

De l'Esprit, semble morne... Où s'achèvent les signes

Définitifs avec la crainte et les regrets ?

 

C'est la question qui tue -ici- la guillotine.

Et des villes ôtées à la Terre de feu

Il simula l'exil ou la fugue enfantine :

Il souffrit d'être là sans trop se prendre au jeu.

 

Il souffrit d'être aimé plus qu'un bouton de rose,

Plus qu'un chuchotement de la mer au nageur,

Davantage que l'or vaporeux, que les choses

Adorables, qu'aux cieux l’impensable clameur.

 

Il souffrit en chemin de Rome assassinée

Bien que le lys sans feuille y tapisse les pas,

Il souffrit d'avoir vu, vu l'horreur dessinée

Sur le plus beau visage, et revu le trépas.

 

Or pour ne pas souffrir plus qu'il est nécessaire

Il s'en alla puiser le bol aimé d'oubli

Sous le premier nuage au sourire de mère

Où la nuit végétale ensemence la nuit.

 

Sous l'arceau fleuri lourd de larmes et de lierres

Persiste cette empreinte en place d'un genou

De femme qui naquit non loin des réverbères

D'où pendent la lumière ocre et la corde au cou.

 

C'est ici que l'enfant, comme il est dit, à l'heure

Ecarlate est venu rencontrer le Destin :

Il s'agenouilla, libre, et contempla ce leurre

Immense : le charnier vomissant le festin.

 

Comme il est dit l'exil du roi le bonifie

Tantôt ou  fait de lui le monstre du détroit,

La silhouette au soir dernier qu'électrifie

Un courroux sans pareil acheminant l'effroi.

 

Car tout aurait pu faire de lui la vengeance

Aux longs bras duveteux qu'adore l'ennemi

Lorsque, étouffé, turgide, il demande clémence

A la Vie au départ, les yeux clos à demi...

 

Tout : l'œuvre du printemps qui s'éveille et jardine

Sur les coteaux blessés par la gifle du gel

Pour que sourde au matin les fleurs et que radine

Aux jardins inhumains l'abeille aux pieds de miel.

 

Tout : La petite larme en coin de l'amoureuse

Au réveil incertain caressé d'un rayon

Quand elle semble lasse ; l'aube est douloureuse

A qui feint de dormir, esclave du  frisson !

 

Tout parmi l'univers jusqu'à l'insulte même

Aurait pu déposer sur son front lumineux

La couronne d'amour sans foi, le diadème

Dénouant la déraison de l'acte nœud par nœud.

 

Mais l'exil c'est le lac sans fin des solitudes,

Où surnage l'ennui d'être et de devenir ;

La chair a disparu de sous ces latitudes

Qu’un air fossilisé s’acharne à soutenir.

 

Le flot cristallisé de sable nu s’irise

Autour, près des géants de vide et d’ossements

Vivant couchés, un poing déterminé qui vise

L’empyrée arthritique ou ses soubassements.

 

Pour n’avoir pas connu, si modeste assemblée,

Sans chemin, les amis du verre ruisselant,

A ce moment précis de conscience troublée,

Compagnons qui savaient que l’amour est violent

 

Pour n'avoir pas connu cet enfant de la veuve

Que l'espoir n'a plus l'art d'animer dans les cours

Quand il vient au soleil sur les rives d'un fleuve

Noyer son jeune deuil dans le fleuve des jours ;

 

Il n'aura fait que fuir contrée après contrée

Sans reconnaître au loin, errante au carrefour,

L'espérance que nul mortel n'a rencontrée,

Il n'aura fait que fuir par crainte du retour.

 

Fuir les ongles nacrés de semblables conquêtes,

Fuir le Christ en sanglots captif à chaque croix,

Fuir le rire outrageux des neuf muses sans têtes,

Fuir du désert suant au pôle des grands froids !

 

Fuir ! C'est là tout l'exil que proposait le monde

A ce pâtre des sens et de la compassion :

Le ciel est toujours bleu, la lune est toujours blonde,

L'herbe est verte, ou jaunie, et rouge est la passion,

 

L'aventure elle-même en devient monotone,

La poudre et le goudron font un même chemin

L'été semble l'hiver, l'hiver semble l'automne

La joie et la douleur tendent la même main...

 

C'est à s'en dégouter d'être l'élu des braises,

D'être l'unique au monde à charmer les phénix,

A faire s'incliner les temples et les fraises

Et le Charon vaincu sur les ondes du Styx.

 

Puisque, au fond, c'était lui qui pour guider la horde

Vers l'île des parfums, des femmes et des fruits

Devait dompter la bête avant qu'elle ne morde

A la gorge l'Espoir qui dort au fond des puits.

 

Lui qu'aurait adoré le prince des poètes

En fredonnant les noms divers de la Beauté

Au crépuscule ! Pour lui les éclats de fêtes

Et les baisers qu'on vole en vain sans cruauté.

 

Tout cela : le moment perdu de votre gloire,

Princesse, et votre corps sale et dévergondé...

Mais il tira la haine hors de sa housse noire,

A la minute où tout lui parut infondé.

 

Insensé le ballet infini des étoiles !

Insensés le chagrin, l'aurore et les rochers !

Almée aux yeux brulants garde culotte et voiles :

Tu n'as pas plus de sens que deux, trois ricochets...

 

Tout, près de son regard, s'élevait tête-bêche :

Des fleurs de son enfance aux stèles des tombeaux

Jusqu'aux tours de ciment et de poutres que lèchent

Des astres renversés sous le vent des flambeaux.

 

Si bien qu'il a choisi pour eux l'apocalypse,

Pour les hommes le sang, pour les femmes les pleurs,

Les prunelles ont dû se soumettre à l'éclipse,

Les cœurs à l'amorphie et le songe à la peur.

 

Il était revenu, pâtre de l'harmonie

Quand il quitta la ville, aujourd'hui meurtrier,

Fléau des premiers temps que narre l'agonie

Des saintes que son art atroce a fait crier.

 

Mais alors qu'il passa par le pompeux portique

De l'impasse du monde en laquelle vibrait

Ses organes saillants sous un ciel exotique

Une voix déclama sans peine le mot vrai.

 

Une voix révoltée autant que chancelante

De jeune fille un peu sans manière, un peu

Décoiffée, au teint mat, la démarche insolente,

Et l'allure d'aimer en son rêve qui veut.

 

Il la nomma Najade et cessa le massacre,

Elle le nomma Ren et posa sur son front

La goutte de rosée et la candeur d'un sacre,

Les soucis d'une amante et la grâce d'un nom.

 

Et pour ce qu'il advint au jour de leur rencontre

La lune s'est fondue au trouble de la mer,

Le temps s'est oublié sur le cadran des montres,

Le soupir des sans voix s'écoulait moins amer,

 

Le tourbillonnement des âmes disparates

Qui lie au jeu du chat la fougue du lion,

Au soldat répugné l'écolière à nattes,

A l'ordre des idées noires sa rébellion

 

Se figea. L'air ambiant s'apaisait, inodore

Sur les royaumes, sur la gloire des nations

Et sur l'humain blessé des flocons de phosphore

      Epanchèrent le joug clément des sensations.

.....................    

Il est là ! Qu'il enchaîne avidement mes pas,

Qu'il m'enferme en chantant au fond d'un mausolée

Afin que je sois humble, et triste, et désolée,

D'être plus à ces pieds que le sang ennemi !

Qu'il me donne le pain et l'eau mûre parmi

Les chiens de son palais tâchés d'ombre et de soie

Puisqu'il est Adonis et le diable qui noie

L'univers tout entier du moindre de ses pleurs.

 

Le néant, la folie, ont su lier nos cœurs,

Mon Ren, regarde-moi, renonce, le mystère

Te trouble, crains que l'aube avance sur la terre

Sans raison, qu'aucun fil ne la traine à tes yeux...

Viens, ta bouche affamée enferme bien des cieux

Que je veux dévoiler nuitamment. Je m'élance

Au delà du ravin que perfore en silence

Ton regard pitoyable, automate enchanté,

Chéri regarde-moi t'enfreindre et te hanter !"

......................

 

 "-Je te vois, folle aimée à lier à l'hospice !

Les fleurs que tu vomis tombent du précipice,

Des parfums de vanille et de mangue ébahis

S'affalent au salon, jardins évanouis

Sur le sofa de cuir où s'ensoleille un fauve.

Viens, ma sainte apparue, il faut que je te sauve

Du lit de l'empereur au panier de serpents !

 

Najade je te vois qui jouis et te repends

Du crime originel, de celui de la veille...

Sous mes doigts en ton âme un démon se réveille

Que j'aime à pénétrer au triomphe du soir.

Je te vois qui gémis mais tremble de me voir

Te souffler à la face entière les pétales

Empoisonnés, le vent de mes plaines natales,

Les parfums des étés de lèpres et de faim

Couronnés par l'odeur de ton soleil défunt !

 

Najade est là qui vit un drame d'artifice,

Le vers sadique des nues troua l'orifice

En son cœur à peu près symétrique et pulpeux,

Elle a bu le nectar de marbre sirupeux

Qui s'écoule des flancs des statues orientales,

Elle en a avalé le sang au son des râles,

Elle est là qui disjoint les anciens continents

Par une pichenette, elle est là, régiments,

Crevez sans un soupir devant mon amoureuse

 

Puisqu'elle est de l'amour final l'avant-coureuse.

 

Najade est à mes pieds, je suis à ses genoux,

 

Le voyage est fini pour les enfants d'Ulysse :

L'âtre étincèle auprès du rite familial...

J'ai marché longuement sur le chemin lilial

Et j'ai perpétué la floraison des hommes.

La tentation naît du serpent et des pommes

 

M'offres-tu l'un des deux ? 

 

                              "-Ni l'un ni l'autre, non,

Mais quel enfer sacré prolonge ton talon ?

Quel tigre anthropophage en ton âme ronronne ?

Quelle fée aux yeux d'or volette et fanfaronne,

T'ayant doté du sang de roi parmi les rois,

Tout près de ton épaule ?"

  

             "-C'est moi !"

 

  "-De nous trois

Je suis ici le maître et ma bouche de verre

N'expliquera pas tout ce qui fait que j'enterre

Le temps, l'espace aride et les ressentiments

A l’ombre du regard alléché des amants.

N'expliquera pas l'eau que je verse à ce vase

S'il y fane la fleur du verbe et de la phrase,

S'il y fane Amsterdam et la rose Paris

Comme au bord des trottoirs fanent les mal nourris...

.

N'expliquera mes mains jalousées des orfèvres.

N’expliquera matin le tonnerre automnal

Ordonné par mes vœux, mon fidèle animal

C'est l'orage acharné, c'est dix mille ans d'averse ;

Nul Chevallier blanc n'a traversé la herse

Qu'il garde sans broncher, sans cligner ni dormir.

 

 

......................

Troisième :

 

 

Sur la couche, à l’aube salie

Najade à Ren l'élu s'allie

Sous l’indolence d'un drap blanc.

 

L'un a le cosmos à son flanc

Gauche à son flanc droit gît la lie

Mystique, la foule palie

Aux os d’ivoire allant ballant

 

Au rythme violent  de sa voix,

Ren qui d’un claquement de doigts

Sublima les tares humaines

 

Et fit osciller le poignard 

Tenant d’une main par les rênes

 

Les chiens difformes de son char.

Quatrième :

 

Les chiens difformes de son char

Et la chienne galvanisée

Aux yeux qu’une lune brisée

Paillette sous l’ombre du fard :

 

Najade qui rend au soleil

L’infirmité de sa naissance,

Et fouine avec complaisance

Dans les carences du sommeil.

 

C’est la gamine redoutable

Qui chasse et projette à sa table

Des cœurs de poètes fumés.

 

Elle aime et tout son corps respire

Les beaux cadavres parfumés

Jonchant le seuil de son empire.

 

Cinquième :

 

Jonchant le seuil de son empire

Je vois d’effroyables jasmins

Qu’on cueille en se coupant les mains,

En y perdant son âme, au pire…

 

Aux sources à jamais taries

De la confiance et de l’amour

Boivent le spectre, le vautour

Et la chimère aux cent caries.

 

Je sens, frères, sœurs, que le sable

Dont chaque grain, si misérable

Qu’il soit, de nous s’est écoulé.

 

Puissances sans nom que nous fûmes

Notre miracle aura roulé

D’amertumes en amertumes.

 

Sixième :

 

D’amertumes en amertumes

Comme un navire naufragé

Qui s’ignore être un passager

De l’oubli suant dans les brumes.

 

Ce couple, ce couple d’esclaves

Dont le maître est le sentiment

Cloue à l’avance, lentement,

Notre cercueil au fond des laves.

 

Il est temps de quitter les lieux,

Dieux de dire nos adieux

A l’impitoyable ironie.

 

Prenons le chemin le plus court

Pour la nuit d’hiver infinie

 

 

 


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commentaires

S
Superbe, Hippocampe, quel souffle ! Avec toute mon amitié.
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