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26 août 2012 7 26 /08 /août /2012 20:19

Prémonition

 

Effleurant le ponton de mon rêve ou d'un fleuve

un navire de nacre affrétait une veuve

qu'il porta, chancelant, jusqu'où je méditais.

La brise a soulevé sous la lune son voile,

lente, par accident, à l'heure où tout s'étoile

et ses yeux pénétrants, d'azur fin, décrétaient

de l'atroce chagrin l'hallucinante liesse.

 

« -De l'or où je naquis à la merde où je meurs

il n'est qu'un pas de biche en qui brûle, déesse,

la triste passion dont les plus saines mœurs

sont de pendre le ciel aux sinistres lanternes

ou d'imiter l'amant nu que rien ne concerne

sinon l'art d'écraser -mille raisins- les cœurs

qu'il veut ensanglantés, puis exsangues... De grâce

demandez-lui, ce soir, qu'il signe et vous embrasse,

vous qui volâtes, lys à sa tige arraché !

 

De la mare où j'ai bu jusqu'où j'ai recraché

les nénuphars, tremblantes nageuses en robes,

il n'est qu'un pas d'enfant sous lequel se dérobe

un amour charcuté par le tranchant des fleurs...

Qu'en est-il du chemin pavé de mes douleurs

arpenté cette nuit d'assassinat du prince ?

 

Là, tendez-moi l'oreille... Entendez-vous qui grince

la porte de l'enfer des quatre vérités

où dorment les démons habillés de lexique ?

 

Qui frôlera la chair des seins que j'ai tétés ?

Ni personne, ni la sublime anorexique

qu'il a fuie en secret pour mieux la regretter.

 

Charme hérité de l'ange exterminateur ! Charme

des serpents infinis dévoreurs d'éléphants !

Voici votre bagou : silence d'oliphants

sur la plaine où les morts ont déposé les armes.

 

Donc ces roses d'Orion j'hésite à les offrir...

Je pense à les revendre au gamin de ma rue

qui n'a plus vu sa mère ocre et frêle sourire

depuis que ce garçon d'un soir a disparu.

 

Ma veuve aimée alors que mon doigt s'exécute

à votre sacrement sous les draps d'un motel

au jardin de Circé fanent les immortelles,

les fleurs d'argent soyeux, les roses-thé, mon but...

 

Vous ferez la timide, un peu, sous les feuillages,

et sur un matelas roux d'épines de pins

vos lectures seront les lignes de ma main :

des stigmates natals aux marques de grillages.

 

Ô veuve que vaudra l'éclat de vos rubis

quand le jour renaîtra sur les frissons d'écume

ensoleillant le ciel qu'ouvre votre pubis

par la persienne close ? Écoutez quand je dis

des mensonges plus beaux que vous-même ; j'assume

cet outrage effarant les outrages subis.

 

Tout comme j'en reviens je parle d'un massacre

illustre, de Gomorrhe en forme de brasier,

à vous qui revenez par ce bateau de nacre

d'un pays analogue au premier baiser.

 

Vous qui fûtes royale avant le guillotine

parlez moi des jardins vibrant au carrousel,

parlez-moi d'autrefois, très fougueuse latine,

les femmes d'aujourd'hui sont des statues de sel...

 

Lorsque le jeune vers babillait sous l'étoile

que vous chantait l'amant tendrement, nuitamment ?

Lorsqu'un premier pinceau bouleversa les toiles

quelle image de vous traçait le sentiment ?

 

Répondez-moi, pitié ! Que faites-vous semblant

d'être sourde et muette ? Il me faut des réponses

pour enfin délier les mûres de nos ronces,

pour que l'enfant d'un soir rencontre son loup blanc.

 

 

« -Vous empourprez mon front, les neiges éternelles

qui l'avait couronné fondent, je suis de celles

qui virent le soleil nourrisson se lever,

jeune homme de vingt ans qui pleure à mon chevet

dont les sanglots tombants meurent en étincelles

aux étranges lueurs. Mais vous m'avez rêvée. »

 

 

A Nolwenn Orillia,premiêre aimée.

 

 

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commentaires

S
Toujours le même souffle qui caractérise ta poésie, Hippocampe, c'est magnifique ! Avec toute mon amitié.
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