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20 octobre 2009 2 20 /10 /octobre /2009 05:19
Chronique du temps - Prélude.




Les temps étaient réels où les hordes régnaient
Sur les sèches toundras et sur les monts venteux.
A leur prompte arrivée les lueurs s’éteignaient,
Les villageois terrés pleuraient dans l’ombre, anxieux.

Les temps étaient réels où les grands prédateurs
Allait chercher chez nous de quoi remplir leur panse
Et soudain dévoraient sous l’oeil du spectateur
Un visage fleurit des saisons de l’enfance.

Les temps étaient réels où le magma furieux
Déferlait en fumant sur les moissons nouvelles,
Subitement figeait les larmes dans les yeux
Prenant de la surprise une image éternelle.

Les temps étaient réels où le froid assassin
Repoussait l’être humain aux portes de la mer
Où , instantanément, se congelait un sein
Privant de nourrisson les bras nus d’une mère.

Les temps étaient réels où le mal et la fièvre
Soufflaient sur les contrées le courant mortifère,
Portant, soudainement, des langues jusqu'aux lèvres
Et dans tous les baisers le brasier de l'enfer.

Il ne fut aucun temps où les anges régnaient
Sur les palais du ciel au marbre nuageux,
Où, lentement, le foie du Titan qui saignait
S’effaçait dans le bec de l’aigle pernicieux.

Il ne fut aucun temps où le grand créateur
Nous apportait la vie dépourvue de son sens
Et comme au ralenti lançait le réacteur
De l’appareil tortu des dégénérescences.

Il ne fut aucun temps où Cupidon curieux
Essayait sur Adam ses flèches éternelles,
Où, doucement, il lui inter-changeait ses voeux
Et lui fit ressentir des affections nouvelles.

Il ne fut aucun temps où, fou d'entre les saints,
Un oracle inscrivait son diagnostique amer
Et mollement croyait de ses délires craints
Du commun des mortels les hideuses chimères.

Il ne fut aucun temps où le loup et le lièvre
Coexistaient pareils à deux semblables frères.
Se louangeant sans heurts lors de discussions mièvres
Et sans instinct mauvais concluaient leurs affaires.

Il fut un temps réel d’origine du monde
Qui dura plus longtemps que le temps de l’humain,
Plus longtemps que le sable et que les dunes blondes
Dans le grand sablier de tous les déserts plein.

Plus longtemps que le temps et toutes ses mesures,
L’horloge et la clepsydre et la fontaine d’eau
N’étaient pas là encore ensembles que l’usure ;
Il fut un temps réel disposé en monceau.

Le monde à l'origine avait un temps réel,
Après ce temps réel vint le temps de l'humain ;
Un temps vif, saccadé, infernal et rebelle
Amputé dans le tas  de temps réel et plein.

Un temps strié d'années, d'heures et de secondes,
De siècles et d’instants et de milliers de sceaux
Qui portèrent l'usure au temps réel du monde ;
Vint le temps de l'humain disposé en morceaux.

Et l'humain allongea des camps sur les collines,
Il devenait berger et chasseur à la fois,
Il mourrait en doutant de ce qui se destine ;
Ce doute persistant fît naître en lui la  foi.

L'humain donna un dieu à toute frêle chose
Pour ne pas s'inquiéter de l'incompréhensible,
Il savait respecter l'autorité des roses,
Il se savait petit, et il se croyait cible.

Il était en tribu, l’humain originel,
Puis il devint dévot, voyageur, gueux ou roi.
En ce temps incertain il se fit infidèle
A l’humain et aux dieux auxquels il se voua.

Il ne fut aucun temps où, crime primordial,
L’agriculteur tuait son frère le pasteur
Et où le premier sang sur le tertre mondial
Dans une flaque rouge étalait le malheur.

Aucun temps, je vous dis, où la femme naïve
Ouvrait d’un oeil curieux la boîte empoisonnée
Puis, feignant la surprise, arguait d’une voix vive
Qu’ils avaient tout prévu quand les dieux l’ont donnée.

Par contre il fut un temps où l’humain déloyal
S’exerçait à lutter contre l’humain fidèle
Aux dieux ou à l’humain de sang gueux ou royal ;
Cela était le temps des premières querelles.

Le temps humain après le temps des origines
Était ce temps brutal où naissaient : Les pêchés,
Le premier lupanar, la première officine,
Le premier à mentir, le premier à prêcher,

Le premier à graver l’histoire de l’humain,
Le premier incrédule apte à la démentir,
Le premier insensible à se faire assassin
Et le sage premier prônant le repentir,

Le premier désireux de la première femme
Donc la première femme arrogante et fragile,
Le premier forgeron donc la première lame,
Le premier exilé donc le premier asile,

Le premier accusé donc la première pierre,
Le premier criminel donc le premier barreau,
Le premier souffrant donc la souffrance première,
Le premier torturé donc le premier bourreau,

L’événement premier donc le premier lassé,
Le premier adoré donc le premier haï,
Et de par cette haine à la suite amassée
Le premier adoré fut le premier trahi,

Le premier mur percé de la première porte,
Le premier promontoire et la première cave,
Dans le premier recoin le premier des cloportes,
Le premier territoire et la première enclave,

Le premier pont surplombant les flots ravageurs
Et le premier barrage endiguant leur démence,
Le premier des noyés, le premier des nageurs,
Le premier corps flottant au départ de l'errance,

Le premier musicien, la première danseuse,
Le premier cri du coeur lâché sublimement,
Le premier vers inscrit, musique silencieuse,
L'art premier, l'absolu, le plus beau dénuement.

Ce fut le temps premier des premiers phénomènes
Qui sans manichéisme éclosaient sur la terre ;
La candeur, la splendeur, le désir et la haine
Apparurent premiers mais derniers pour l'Ether.






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