Et puis, qu'avez-vous vu ? version finale.
Au Sahel inondé de sable et de fluor,
Frères, sachez-le, nous vîmes ce que nous pûmes ;
Nous portions l'orphelin hors des noires écumes
Sitôt le grouillement des termitières d'or.
Tandis que l'hydre lent dévora le parfum
Des nanas en sommeil aux paumes scarifiées,
Au front pâle où pendaient des mèches falsifiées
Collant l'ombre à jamais sur un regard défunt
Nous avons rattaché le peuple des ilots
Ensemble avec des liens de laine, fatidiques,
Mais le chant psalmodié par les femmes pudiques
N'a jamais dérangé le cœur des angelots.
Il me semble que l'homme on ne le vit géant
Que seul, tel vagabond dans la courses des mondes !
Depuis qu'on vit s'enfuir les nébuleuses rondes
Derrière un réverbère, épousant le néant.
On vit s'articuler cet infect récital
De bêlements perdus d'un bétail sans pâture
Aux yeux écarquillés, fleuris sous la torture,
Qui buvait au ruisseau de curare fatal.
On vit dans notre gorge une dose de lait
Que l'extase monta jusqu'à l'ébullition
Bu sur les joues nacrées, sans nulle permission,
Des fiancées d'un soir d'où le sublime naît.
Nos iris ont mordu la crème du whisky
Et la glace ! Affalés dans l'hiver de notre âge :
Les restes d'un regret, l'environ d'un orage,
Dans un fauteuil marron, sur du Tchaïkovski.
On vit le mois joyeux d'avril au bord de mer
Où dansaient dans nos mains quelques fées relatées
Dans un conte or on vit nos âmes frelatées
Ce jour où s'exposa quelque mirage amer !
On vit nos poings en feu marteler les fronts plats
Des gothas prosternés aux panards des richesses
Puisqu'on les vit pointer d'un doigt lourd de paresses
Les exilés et les sbires mêlés en tas.
On se vit accueillir leur peine avec douceur
Car nos esprits errants magnétisaient les nues ;
Nous dansions sous le faix des insultes accrues
Nous les solistes bruts aux foulées de valseur !
Je ne garantis pas que notre œil était nu
Lorsque nous avons vu le fiel et les mirages
Splendides, indistincts... mais voici des images ;
Et qu'après l'on nous dise : « Et puis, qu'avez-vous vu ? »
commenter cet article …