Après l'éclat la nuit...
Ou
Le crépuscule des égéries.
Inconstance
O reine de mes bien-aimées,
Apprends que je les ai nommées
Des reines aussi tour à tour ;
Chacune est belle et ne ressemble
A nulle autre, et toutes ensemble
Tu les as fait pâlir un jour[...]
Sully Prudhomme.
Après l'éclat la nuit, catafalque où se couchent
Les belles dont mes doigts en deuil ferment les bouches
Et les yeux ; fleurs de Mai que décembre a gelées.
(Quand au lointain vêtu de perles étoilées
Ivre d'être vivant un peuple funambule
Sans cesse caressant son seul point bascule
Dans un gouffre sans fond manque de vaciller
Vos fleurs de givre et tranquilles semblent ciller...)
Vous ai-je aimées, toujours l'autre décimant l'une,
Muses d'un soir tantôt blonde, châtain ou brune,
Amours que mon poème enterre sans pitié
Au cœur d'une clairière où saigne un églantier
Sur cette éternité des corolles de glace ?
Au cimetière rose où trouver votre place ?
Ressusciterez-vous plus belles qu'autrefois
Demoiselles de vers dont fantasment les rois
Quand un poète, en vous, contemple une déesse?
Mais que devenez-vous quand le vers vous délaisse,
Vous repoussant d'un point final vers le passé ?
Quand, au fronton du texte ou terme ressassé,
Vos prénoms, plus vivants, semblent de la magie
Mélangez-vous aux clairs ruisseaux de nostalgie
Les flaques d'espérance ?
Et que vous vaut la chair
Quand vous êtes la même : fille de la mer
Qui, se transfigurant, reste la mer ?
Silence
Pour les sentiments morts sans aucune souffrance.
En deuil, mes doigts ont clos les bouches et les yeux
Des belles qu'un poème arrache et rend aux cieux.
commenter cet article …