Fragments du chant de la lune :
Sélénienne une nuit blanche
Me rappelle d’où je reviens :
De nulle part et seul, étanche
J’écris ma mort : le mot Destin.
[...]
D’où viens-je ? Suis-je, au fond, de la lune le môme
Ou du néant le père ? Et suis-je, simplement ?
Nul Nadir aujourd’hui ne répandra son dôme ;
C’est la réminiscence… un horrible moment
.
[...]
Car il faut réfléchir, en cette veille il faut
Ne pas sombrer dans la rage sentimentale,
Il faut, serein, cerner cette force mentale
Où se moule l’objet qui domine la faux.
[...]
Ma mère, sainte alors, me fit naître sans doute
Au terme des neuf mois les plus précautionneux
Dont l’humain est capable, une vie est en route ;
Le sentier se trace en pavage cotonneux.
[...]
Lancinante une berceuse, un
Mobile évasif tournoyant…
Le bébé chiale et sa maman
L’apaise de sa voix de lin.
Potelés, idiots, ses deux bras bougent, il
Est un orphelin nu. D’Orphée l’aller-retour
Est fait : le paludisme a convoité ses jours
Mais il a survécu ; les dents contre le fil.
[...]
France ! Ô sacre de soie qu’être ton citoyen !
Royaume millénaire et neuve république
J’approuve ton histoire et d’un salut publique
Je te sacre de vers et t’offre mon seul bien.
Mais ce fut difficile : être malgache est noble
Autant qu’exotique et je voulais l’exception
Que je ne sus trouver dans l’orgueil d’un vignoble
Ni dans le feu gravé du mot Révolution.
L’échec amoncelait son suicide latent
J’étais un apatride à la poitrine en deux
Tranchée. Qu’étais-je ? Un gosse aux mots couverts de bleus
Que partageaient deux, trois disciples de Lacan.
Exceptionnels, on voudrait
L’être tous… Est-ce donc stupide ?
Un jour s’élever loin du trait
Car d’un je-ne-sais-quoi cupides…
[...]
Nulle caresse, amante apte à tresser le crin,
N’aura raison du sang que versent mes œillades,
Que ton cœur de cristal retourne à son écrin
Et ton visage en fleur aux rives des naïades.
[...]
Je sui le Dépourvu, le Seul, le Décimé,
Le mendiant d’Amour à la gorge pendue.
Tout est mort, tout est mort ; et l’enfance et le vent,
Sont emportés au loin, dans le néant suprême.
La nuit s’est achevée sur mon orbite blême
Mais ne me rendez pas ce que j’avais avant.
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